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La baisse du loyer lors du renouvellement du bail commercial
19 juin 2018
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La baisse du loyer lors du renouvellement du bail commercial

Maître Grégory Cherqui intervient quotidiennement en matière de renouvellement de bail commercial.

La première problématique qui se pose à l’occasion du renouvellement du bail est naturellement celle du montant du loyer du bail renouvelé.

Pour nombre de locataires et dans l’inconscient collectif, le renouvellement du bail rime bien souvent avec une augmentation prévisible du loyer.

Cette idée reçue semble liée, avant toute chose, à la référence que constitue l’indice légal pris en considération pour l’application de la règle du plafonnement du loyer lors du renouvellement du bail (auparavant, l’indice du coût de la construction et, désormais, l’indice des loyers commerciaux ou bien, dans certains cas, l’indice des loyers des activités tertiaires).

En effet, alors même que la règle du plafonnement du loyer à l’indice ne constitue, par définition, qu’un « plafond » protecteur du locataire et nullement un « plancher », l’idée selon laquelle cet indice légal devrait s’appliquer mécaniquement à l’occasion du renouvellement du bail, comme s’il s’agissait d’une clause d’indexation automatique, a fini par pénétrer les esprits.

L’autre explication de cette idée reçue semble résider dans la croyance qu’avec le temps, une valeur locative ne peut qu’augmenter et qu’il serait même, en quelque sorte, immoral à l’égard du Bailleur de solliciter un loyer de renouvellement plus faible que le loyer en cours, voire plus faible que le loyer initial.

Or, nous savons qu’il n’en est rien :  la règle du plafonnement à l’indice n’est qu’un plafond. Elle n’est ni un plancher ni une indexation automatique.

Et la valeur locative est susceptible en tous lieux et en toutes époques, de baisser comme de monter.

1. La fixation du loyer de renouvellement à la baisse par application de la valeur locative

La Loi pose le principe selon lequel le loyer du bail renouvelé doit correspondre à la valeur locative.

A défaut d’accord amiable des parties sur celle-ci, le Juge éventuellement saisi du litige devra se référer aux caractéristiques du local, à la destination des lieux, aux obligations respectives des parties, aux facteurs locaux de commercialité et aux prix couramment pratiqués dans le voisinage, après avoir, le cas échéant, recueilli l’avis d’un Expert judiciaire.

Cependant, par exception au principe général, et afin de protéger le locataire, le législateur a institué le mécanisme du plafonnement en vertu duquel le loyer du bail commercial renouvelé ne peut excéder le montant résultant de l’évolution de l’indice national trimestriel applicable (l’indice des loyers commerciaux ou bien, le cas échéant, l’indice des loyers des activités tertiaires), même si la valeur locative lui est supérieure.

Aussi, dans la mesure où cette règle du plafonnement à l’indice, comme il a été dit, ne constitue par définition qu’un « plafond » et en aucun cas un « plancher », si la valeur locative est inférieure au loyer plafonné, c’est bien à la valeur locative que le loyer de renouvellement devra être fixé, même si celle-ci est plus basse que le loyer en cours, voire plus basse que le loyer convenu lors de la signature du bail initial.

Il est important de préciser que pour obtenir une diminution de loyer à l’occasion du renouvellement du bail, la seule preuve que doit rapporter le locataire est celle du montant de la valeur locative elle-même.

En effet, contrairement à l’hypothèse du déplafonnement du loyer où il est fait obligation au Bailleur (qui souhaite faire fixer le loyer à la valeur locative alors même que celle-ci est supérieure au loyer issu de la règle du plafonnement),  soit de justifier de l’existence d’un cas de déplafonnement de plein droit, soit de démontrer l’existence d’une cause motivée de déplafonnement du loyer (par exemple, une amélioration notable des facteurs de commercialité ou bien des caractéristiques des locaux…), dans l’hypothèse d’une demande de baisse de loyer, et dans la mesure où il n’y a pas de plancher, le locataire n’a pas à faire la démonstration d’une quelconque baisse objective des facteurs locaux de commercialité.

Le problème n’est donc pas de savoir si la valeur locative sur laquelle les parties se sont entendues lors de la signature du bail initial (ou de la conclusion du précédent renouvellement de bail) pour fixer leur loyer contractuel, a baissé ou non et encore moins de prouver qu’il y aurait eu une quelconque baisse de la commercialité.

La seule question sera celle de savoir à combien s’élève la valeur locative au moment du renouvellement du bail, et ce, nonobstant le niveau qui lui avait été attribué contractuellement par les Parties lors de la signature du bail initial ou du précédent renouvellement de bail.

En effet, le loyer accepté contractuellement, n’est pas toujours révélateur de la valeur locative réelle des lieux à un moment donné.

Il peut être le fruit d’une méconnaissance du marché local par le candidat locataire.

Il peut être également le signe d’un empressement particulier de certaines enseignes à occuper les meilleurs emplacements.

Par exemple, lors de l’explosion de la téléphonie mobile, les grands opérateurs nationaux n’ont pas hésité à accepter des loyers hors de proportion avec la valeur locative et ce, pour se positionner le plus vite possible sur les meilleurs emplacements de centres-villes, sans regarder à la dépense.

Cela étant dit, en pratique, il est certain que la disparition de certains éléments objectifs qui participaient à la commercialité d’un secteur, contribuera à convaincre un Expert judiciaire et, partant, un Juge des loyers commerciaux, de l’existence d’une baisse de la valeur locative.

Dans le même sens, le nombre de commerces vacants, s’il n’est pas dû à la hauteur des loyers sollicités mais au faible nombre de candidats intéressés, sera également un signe démonstratif de la baisse de la valeur locative.

Mais la meilleure démonstration du niveau de la valeur locative, consistera à relever de la façon la plus exhaustive possible l’ensemble des prix couramment pratiqués dans le voisinage (prix des nouvelles locations, niveau des renouvellements amiables, valeurs judiciaires…).

2. La baisse du loyer lors du renouvellement du bail par la simple application de la règle du plafonnement à l’indice

La Loi dite PINEL du 18 juin 2014, a supprimé la référence à l’indice du coût de la construction (ICC), au profit de l’indice des loyers commerciaux (ILC) ou de l’indice des loyers des activités tertiaires (ILAT) pour la fixation du loyer plafonné à l’indice, notamment lors du renouvellement du bail.

Or, nous savons que, d’une façon générale, la variation de l’indice du coût de la construction a tendance à augmenter davantage que celle de l’indice des loyers commerciaux ou que celle de l’indice des loyers des activités tertiaires sur une durée longue, comme celle d’une durée de 9 ans.

Ainsi, lorsque le loyer contractuel consenti lors du bail initial ou lors du précédent avenant de renouvellement de bail est soumis à une clause d’indexation annuelle basée sur l’indice du coût de la construction, l’application de la règle du plafonnement du loyer du bail renouvelé à l’ILC ou à l’ILAT entraîne systématiquement et automatiquement une baisse de loyer, (naturellement, à défaut de cause de déplafonnement du loyer à la valeur locative).

Exemple de cette substitution légale automatique :

Supposons un bail initial avec effet au 1er avril 2006

Ce bail est consenti moyennant un loyer annuel de 150.000 € en principal, soumis à une clause d’indexation annuelle basée sur l’ICC, le 1er avril de chaque année, l’indice de base prévue par la clause étant celui du 4ème trimestre 2005, soit 1332.

Le bail vient en renouvellement au 1er avril 2015, soit postérieurement à la date d’entrée en vigueur de la Loi PINEL du 18 juin 2014.

Par l’effet des indexations annuelles successives basées sur l’ICC, le loyer annuel exigible au 1er avril 2015 s’élève à la somme de 182 995.50€ calculée comme suit :

150 000 : 1332 (ICC 4 T 2005) X 1625 (ICC 4T 2014) = 182 995.50€

Supposons qu’à défaut de droit au déplafonnement, il soit fait application de la règle du plafonnement en fin de bail, sur la base de l’ILC :

*il conviendra de prendre pour loyer de base, le loyer initial fixé contractuellement 9 ans plus tôt, soit 150 000€ et non le dernier loyer indexé.

*il conviendra de prendre pour indice multiplicateur le dernier indice ILC publié au jour de la date d’effet du renouvellement du bail, à savoir en l’espèce, l’indice ILC du 4T 2014, soit 108.47, et pour indice de division, l’indice ILC publié 9 ans plus tôt, à savoir l’indice du 4T 2005, soit 93.46.

SOIT : 150 000 : 93.46 (ILC 4T 2005) X 108.47 (ILC 4T 2014) = 174 090.52€

CONCLUSION : la seule application de la substitution d’indice prévue par la Loi a permis une baisse de loyer d’environ 9000€/an en principal.

Il est néanmoins à noter que plus le loyer de base est important, plus cet écart sera visible.

Maître Grégory Cherqui se tient à votre disposition pour toute action ayant pour objet la fixation du loyer du bail commercial renouvelé.

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